A-t-on le droit de claquer la porte de son employeur avant de solliciter son réengagement?
SCLESSIN «J'ai été confronté à des problèmes personnels, d'ordre privé et nullement en relation avec le football. Mais de cet épisode appartenant au passé, je ne veux pas en parler. Je sais que je vais être jugé plus durement au vu de ces événements, y compris par les supporters.»
Voilà en synthèse les propos tenus ce week-end par Milan Rapaic revenu au bercail de Sclessin d'une manière assez surprenante. Assurément, cette situation ne peut laisser indifférent. Sommes-nous nombreux, dans le monde du travail, à pouvoir nous délivrer de nos obligations professionnelles d'une minute à l'autre avant de solliciter une réintégration trois mois plus tard auprès de nos employeurs? Pas sûr.
Néanmoins, au vu du mystère qui entoure les raisons officielles pour lesquelles le Croate a agi de la sorte, deux points de vue contraires vont se confronter.
D'un côté, une frange de la population et des supporters liégeois risque de rapidement refermer cette parenthèse à partir du moment où Milan Rapaic va apporter un plus sportif au club de son coeur. D'au- tant plus que depuis les trois coups de la saison, le Standard se plaint de connaître des difficultés sur le flanc gauche. Dès lors, ce renfort que l'on dit connaître du côté de Sclessin peut sportivement effacer son erreur du 4 août dernier. Imaginez simplement que, comme l'an dernier, il débute contre le rival bruxellois... et qu'il s'y montre décisif!
Humainement acceptable?
D'un autre côté, on ne peut passer sous silence l'aspect humain et le risque de créer un précédent. Comment, en effet, malgré son approbation de façade, le groupe va- t-il accueillir le gaucher de Split sans aucune restriction? Quelque chose a été rompu et solidifier à nouveau l'édifice n'a rien de simple en apparence. Pourquoi, dès à présent, un joueur sous contrat ne pourrait-il pas faire valoir des ennuis privés pour prendre du recul et s'en aller à la pêche? En agissant de la sorte, le Standard risque aussi de créer un précédent dans le milieu du football. À côté de l'aspect purement contractuel, se place également l'aspect humain! En étant pratiquant d'une discipline collective, vous appartenez à un groupe. Par définition solidaire dans les bons comme dans les mauvais moments. En quittant le navire juste avant les trois coups de la saison (le 4 août), Rapaic a quelque part trahi la confiance de ses partenaires. On peut donc légitimement s'interroger sur la volonté de tous les membres de l'équipe à se réjouir de ce retour inopiné.
Néanmoins, si l'on peut pour le moins se montrer très étonné par la nouvelle, une donnée cruciale et essentielle nous échappe pour trancher définitivement: les raisons réelles de l'envol du Croate demeurent du domaine de l'inexpliqué. Une vraie énigme!
Réactions diverses
Dans le chef des supporters, on est prêt à beaucoup de choses afin de voir le Standard renouer avec son passé glorieux. Néanmoins, des faits aussi marquants ne peuvent laisser personne indifférent.
«Peu importent les raisons de sa fuite, je n'admettais pas et je n'admets toujours pas que ce type lâche le groupe, le staff et son employeur à deux jours de la reprise», pouvait-on lire sur le site Internet de Sclessin. Où d'autres s'interrogeaient sur le pourquoi d'une absence de procédure judiciaire de la part du club à l'égard de sa brebis galeuse. «Je crois qu'on ne saura jamais vraiment ce qui s'est réellement passé, parce que la passivité relative de la direction dans toute cette histoire, depuis son départ, me laisse perplexe.»
Par ailleurs, un petit sondage démontre que le supporter rouche privilégie clairement l'aspect sportif et sa soif de victoires: 54% des sympathisants liégeois approuvent le retour du Croate, 20% y sont opposés tandis que 26% demeurent indécis!
Emmanuel Thyssen
© Les Sports 2005